Au début des années 1940, le Dr. Harold Abramson, pédiatre de New York, étudia longuement des cas déchirants de bébés morts étouffés accidentellement pendant leur sommeil. En les analysant l’un après l’autre, il remarqua qu’une grande majorité des décès se produisaient alors que les bébés dormaient sur le ventre. Dans le Journal of Pediatrics, Abramson suggéra qu’on pouvait en inférer un lien entre la position de sommeil d’un nouveau-né et ce qu’on appelle «la mort subite du nourrisson», ou MSN. Au cours des décennies qui suivirent, d’autres chercheurs remarquèrent que les cas de MSN étaient moins nombreux dans les pays où les enfants étaient couchés sur le dos. Cinquante ans après l’étude d’Abramson, l’American Academy of Pediatrics lança officiellement une campagne «Back to Sleep» [Dodo sur le dos], recommandant aux parents de coucher les nourrissons sur le dos pendant leur première année. La campagne fut un grand succès: depuis son lancement en 1992, le taux de MSN aux États-Unis a été réduit de moitié.
Mais il y a un inconvénient: recommander aux parents de ne pas coucher leur bébé sur le ventre pour dormir les a complètement dissuadés de le faire. Et il s’avère que ne jamais mettre un nourrisson sur le ventre entrave un moment-clé de son développement. Moins les enfants passent de temps sur le ventre, plus ils ont tendance à prendre du retard pour acquérir les facultés moteur de la première année, ce qui retarde d’autant des prouesses toutes simples comme lever la tête, et les mouvements plus compliqués comme se retourner, ramper et tirer sur les bras pour se mettre debout. Cependant, les médecins hésitent à crier au loup car les enfants marchent généralement peu de temps après leur premier anniversaire quel que soit le temps qu’ils aient passé sur le ventre. Mais les preuves qui s’accumulent tendent à prouver que le timing des jalons de motricité qui précèdent la marche est crucial et peut même avoir une influence sur la santé et les capacités cognitives à long terme.